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«Les patients ont droit au meilleur traitement»

31 janv. 2024
FSP
Profession de la psychologie, Psychothérapie
31 janv. 2024
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Profession de la psychologie, Psychothérapie
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La psychologue Florence von Gunten souhaite que la psychothérapie prenne une orientation résolument moderne. À cet effet, elle développe une solution helvétique pour pratiquer la psychothérapie mixte.

A quoi ressemblera l’avenir de la psychothérapie? Difficile de répondre à cette question précisément. Mais, une chose est sûre, les outils digitaux feront leur entrée dans la psychothérapie, à l’instar des autres domaines de notre vie quotidienne. Visioconférences, programmes d’auto-assistance et autres chatbots font déjà foison sur le marché. Là au milieu, une méthode se démarque des autres sur les plans de la portée et de l’efficacité: la «blended psychotherapy», ou psychothérapie mixte. La combinaison de séances communes en face à face et d'activités thérapeutiques en ligne entre les séances a prouvé son efficacité dans diverses études nationales et internationales. Elle a déjà été utilisée avec succès par des thérapeutes dans plusieurs pays européens et aux États-Unis. La majorité des experts s’accordent à dire qu’elle offre un potentiel prometteur pour améliorer l’expérience thérapeutique, ainsi que l’efficacité du traitement. Rencontre avec la jeune entrepreneuse et psychologue FSP Florence von Gunten, à la tête de la firme bernoise YLAH. 

Florence von Gunten, comment vous est venue l’idée de fonder YLAH?
Grâce à ma formation initiale d'infirmière, j'ai pu travailler en psychiatrie pendant mes études de psychologie. J'ai donc été en contact étroit avec les patient-e-s. J’ai vite compris que les nouvelles technologies avaient un grand potentiel pour l’avenir. Mais j’ai aussi vite remarqué que les solutions disponibles étaient encore rares. L’idée de créer un tel outil s’est cristallisée en 2019. Près de 200 interviews avec des professionnels, des personnes concernées et des expert-e-s m'ont permis de développer un concept et d'obtenir le soutien de l'université de Berne, avec le professeur Thomas Berger. Nous avons fondé en 2022 la société YLAH AG avec laquelle nous développons un logiciel médical destiné à une application web et mobile interactive pour les thérapeutes et les patient-e-s, qui a pour but de combler le manque de prise en charge entre deux séances de thérapie. 
Le principe semble assez fondamental. N’existe-t-il vraiment pas encore de produit comparable ?
ll y a vraiment très peu de produits dans le domaine de la psychothérapie en ligne. Certaines solutions existent aux Pays-Bas ou en Allemagne, mais le marché suisse n’est pas très attractif pour les produits venant de l’étranger. Depuis une vingtaine d’années, les recherches menées sur le sujet se sont intensifiées. Et puis on s'est rendu compte que les applications purement en ligne n'étaient pas bien utilisées par les patient-e-s, qu'il y avait un taux d'abandon élevé et que l’imbrication avec le traitement traditionnel n’était pas réussie. En impliquant les spécialistes dans le traitement en ligne, les résultats s'améliorent. Grâce au suivi entre les séances, l'intensité de la thérapie est renforcée, ce qui en augmente l'efficacité. Nous avons donc conçu dès le départ le produit pour qu’il soit dédié à la psychothérapie mixte. Nous espérons ainsi ancrer davantage cette approche en Suisse. 
«Les résultats s'améliorent lorsque les spécialistes sont impliqué-e-s dans le traitement en ligne»
Y a-t-il encore d’autres avantage d’utiliser un tel produit?
L’un des avantages est de permettre aux patientes et aux patients d'utiliser le produit pendant le délai d'attente avant leur premier rendez-vous, par exemple. En tant que thérapeute, je peux déjà les inviter à découvrir l’outil, à faire les chapitres introductifs et je peux même déjà leur attribuer certaines activités. Des questionnaires permettent d’aller chercher des informations auprès des futur-e-s patient-e-s avant même le premier rendez-vous. 
Et lors du suivi?
Lors du suivi, l’application aide à améliorer la structure du traitement et l’assurance qualité. Les psychothérapeutes peuvent par exemple en un coup d’œil analyser l'évolution de la situation avec des questionnaires cliniquement validés. En outre, ils peuvent attribuer des exercices ou des tâches au patient pendant la séance et planifier des séances. Les patientes et les patients se sentent alors plus intégrés dans le traitement et sont plus ouverts dans la communication. L'application permet de les motiver à s'exercer davantage entre deux séances. 
A quel type de patient-e-s l’outil est-il adapté?
Pour l'instant, nous avons développé le produit pour les patient-e-s souffrant de dépression. L’année prochaine, nous y ajouterons des modules sur les thèmes du sommeil et de l’anxiété. Puis suivront les dépendances, la régulation des émotions, et l’estime de soi. Pour chaque sujet, une série d’inputs interactifs par le biais de textes, d’illustrations, d’audios, et bientôt de vidéos. L’application doit pouvoir être utilisée aussi bien en ambulatoire qu’en milieu hospitalier. 
Les clients peuvent-ils directement s’adresser à vous?
Non. Pour l’instant, cela doit passer par des thérapeutes qui proposent ce type de suivi en complément du traitement traditionnel. Mais c’est notre vision pour l'avenir, d’avoir un accès direct aux patientes et aux patients. Cela doit permettre d’offrir un accès et un soutien à ceux qui n'ont pas encore trouvé de place en thérapie. 
Qu’en est-il du financement?
Pour le moment, nous sommes financés par des fonds de recherche, la promotion économique cantonale et des investisseurs privés qui croient en le potentiel de ce produit. Nous générons de premiers revenus grâce à différents projets en collaboration avec des cliniques, dans lesquelles nous apportons un conseil de transition digitale. À l’avenir, nous devrons toutefois générer des revenus grâce à des frais de licence pour les applications du côté des patient-e-s et des psychothérapeutes. Le produit n’est toutefois pas encore pleinement commercialisé, l’utilisation actuelle se fait dans le cadre de la recherche. YLAH fait partie des produits thérapeutiques numériques qui doivent être certifiés par Swissmedic pour un usage commercial. Nous sommes déjà bien avancés dans le processus. Au deuxième trimestre 2024, le produit devrait être disponible sur le marché. 
Quels sont les principaux défis de ce produit?
La protection des données est certainement un grand défi dans tout produit digital aujourd’hui. Surtout sur le plan de la communication, car il y a beaucoup d’incertitudes et de craintes à ce sujet. Nous respectons la loi suisse sur la protection des données. Ce volet est intégré dans le développement de nos produits et examiné pour chaque nouvelle fonctionnalité. La question du remboursement de ce type de prestations, par encore réglementé en Suisse, est un défi encore plus grand. Nous sommes en contact avec des expert-e-s et des caisses-maladie pour avancer sur ce point et permettre un remboursement aussi tôt que possible. En attendant, la licence reste gratuite pour les patient-e-s afin de ne pas créer d'obstacles. En fin de compte, c'est un facteur décisif. 
Avez-vous déjà des idées de développements futurs ?
Le développement du logiciel se poursuit en permanence. Nous allons bientôt proposer de nouvelles fonctionnalités: une sorte de journal de bord, ainsi qu’un outil de planification des séances. Et pourquoi pas un jour un algorithme qui, sur la base du profil de la patiente ou du patient, fait des recommandations aux psychothérapeutes. Bien sûr, les spécialistes resteraient aux commandes, mais le système pourrait faire des propositions d’activité ou d’aspects à surveiller. Nous ne voulons pas remplacer les psychothérapeutes. Mais nous souhaiterions vraiment que la psychothérapie prenne ainsi une orientation moderne, en réponse aux nouveaux besoins des patientes et des patients. Ces derniers ont droit au meilleur traitement. À nous de nous donner les moyens de le leur offrir. 
YLAH – terme bernois qui signifie «se laisser aller à la thérapie» - est une solution suisse pour la pratique de la psychothérapie mixte, basée sur les récents résultats de la recherche. 
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